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25 mai 2025

Mes brouillards et mon beau temps

Plus j’avance en âge et plus j’ai envie de sauter les clôtures du gros bon sens. Je prends conscience que mon temps ici-bas s’achève. Déjà, j’imagine quelques scénarios. Mes genoux qui craquellent, mes doigts qui grimpent les uns sur les autres, mes affreux oublis et ma mémoire qui devient une réelle passoire.

Au quotidien, je sème quelques graines dans mon cervelet mollet et rien ne pousse. J’essaie d’écrire, je cherche de jolis mots, quelques belles phrases ou une nouvelle histoire à vous raconter. J’avance et j’implore les anges. L’écriture pourrait-elle encore être ma prière matinale?

Très tôt, très souvent au café, j’écris comme si je n’allais jamais mourir. Aujourd’hui (le 11 mai 2025), je célèbre la fête de toutes les mères et je me demande où sont mes trois enfants. Tous dans la cinquantaine, ce sont peut-être leurs rejetons qui, en fin de journée, me diront « Bonne fête des Mères, grand-mère! ».

Ainsi va la vie. Mon âge s’affaire à grimper plus haut que les nuages. J’essaie de rester forte, j’en perds des bouts. Je vis au gré de ma météo avec mes brouillards et mon beau temps cachés en dedans de moi.

J’observe le gazon tout jaune de pissenlits, l’eau trop froide de la piscine, deux marmottes sous ma galerie, quelques jeunes chevreuils grignotant ma haie de cèdres. Dehors, sur mon toit en pente, quelques corneilles s’agrippent et s’agitent, braquant leurs yeux sur un petit chardonneret jaune aux ailes noiraudes. Vite, j’enfile mes vieux bottillons et je remplis toutes les mangeoires de graines de tournesol. L’oiseau jaune construira-t-il son nid tout près des grandes fenêtres de ma cuisine? Suis-je en contrôle de la situation? J’ai quelquefois l’impression que le quadrilatère de ma grande maison rapetisse à vue d’œil. Plus je lis, plus les livres s’empilent, et plus j’oublie la thématique de chaque étagère.

Chaque matin, j’écris pour que ma vie vaille encore la peine d’être vécue. Mère sans père, accro aux mots, j’ai toujours un calepin à portée de main, un ou deux stylos qui ne tachent pas les doigts, des notes, des milliers de notes à me rappeler, à recopier, à peaufiner. Mon esprit emprunte des routes imprévisibles; une succession inédite de lignes se dirigeant toutes vers l’empire du silence. Vivrai-je encore longtemps? J’aimerais m’endormir dans une immense forêt de sapins. Dos au sol, je respirerai le sublime parfum des arbres. Sans larmes, ni peur, ni remords, simplement devenir quelque pitance pour les verres de terre.

Pour moi, vivre est un plaisir qui commence à ressembler à un début d’inquiétude. Fini les longs voyages en Mini, les départs improvisés, les arrivées épuisées. J’espère encore pouvoir imaginer tout ce que je n’ai pas vécu. Même l’amour, ce vagabond inarrêtable. L’aurais-je entendu s’il avait cogné à ma porte? Toutes ces années de femme d’affaires trop occupée à gagner sa croûte; toutes ces réussites m’auraient-elles privée d’amour? Même avec mon nom affiché en grosses lettres sur plus de cent quarante devantures, qui se souviendra de moi?

Écrire, je vous le jure, demeure l’acte par excellence pour amadouer le brouillard mental de mon esprit. Depuis plus de cinq ans, j’écris pratiquement chaque jour, souvent aussi en soirée et dans mon lit la nuit lorsqu’un mauvais rêve me réveille en sursaut. Je ne bois que de l’eau la nuit pour que coulent mes idées.

J’ai souvent l’impression qu’avancer dans une histoire provoque en moi quelques trémolos de plus en plus difficiles à cerner. Parfois un titre s’impose, une ligne énigmatique s’échappe de ma tête, un souvenir à moitié déterré surgit de mon enfance en Gaspésie.

Je creuse, j’explore, je cherche du temps pour allonger mon existence. Je ne suis peut-être qu’une vieille ardoise, mais en excellente santé malgré les aléas d’une mémoire qui n’en fait qu’à sa tête. J’ai encore tellement à dire avant de prendre le large. Tellement de questions à élucider, tellement de monde à remercier de m’avoir aimée.

Cora
♥️

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