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3 février 2023

Une tempête de neige

7 h 30 en route vers le café du village
Ce matin, en quittant la maison, j’ai tout de suite été éblouie par le spectacle de la neige. Un épais brouillard blanc me donnait l’impression que le ciel s’était transformé en immense salle de bal où des milliers de gros flocons valsaient avec de magnifiques compagnes en crinolines de lin blanc. À mi-chemin de la descente vers la route principale, j’ai immobilisé la bagnole. À ma droite, les branches d’un majestueux sapin exhibaient ses immenses meringues de neige. Le pied solide sur le frein, je cherchais mon cellulaire pour capturer ce trop-plein de beauté. Clic, clic, clic. L’hiver n’a jamais été aussi beau qu’aujourd’hui.

Oui, oui! Même plus beau que dans la fameuse balade en traîneau du Docteur Jivago (interprété par Omar Sharif) avec son amoureuse Lara (Julie Christie) dans le film inspiré du roman de Boris Pasternak et réalisé par David Lean, Docteur Jivago, sorti en salle en 1965. J’avais alors 18 ans et je me souviens encore de chaque détail de cette magnifique histoire d’amour. J’entends encore aujourd’hui, en vous écrivant, l’immortelle musique et la chanson Lara du compositeur Maurice Jarre. Allez sur YOUTUBE et écoutez la chanson. C’est presque aussi beau que la plus belle tempête de neige!

Mes quatre roues bien agrippées à la route 117, je roule vers le café. Sera-t-il ouvert? Je demeure très proche, que cinq ou six rues à traverser pour y être. Je roule à pas de tortue et ne peux m’empêcher d’admirer une dizaine d’hommes-enfants jouant avec de gros camions poussant la neige sur les trottoirs. À travers la buée de leurs longs parebrises, j’entrevois leurs joues rouges et leurs sourires fendus jusqu’aux oreilles. Ils s’amusent comme des enfants, j’en suis certaine. Sont-ils au moins raisonnablement payés pour autant de plaisir hivernal?

Les anciens déneigeurs de mon entrée ont fermé boutique l’année dernière. Je les aimais beaucoup, surtout le pelleteur à la main qui gardait ma galerie et le devant des deux portes de garage spic and span tout l’hiver. Je sais d’expérience que lorsqu’on doit remplacer une bonne personne, on est toujours un peu inquiet, comme s’il s’agissait de remplacer un vice-président des finances. Faut donc se calmer le pompon et avoir confiance en l’humanité. Personne ne veut mal faire; surtout pas ceux qui ont à cœur de passer l’hiver au froid, dans la tornade, et bien souvent avec des doigts à moitié gelés.

7 h 58
J’arrive enfin dans un espace presque vide avec quatre employés accoudés sur le haut comptoir à viennoiseries. Deux d’entre eux s’élancent vers la machine pour me faire un latté. Le café est un endroit magique. Je m’y installe quasi toujours à la même table sauf lorsqu’un inconnu arrive et s’y assoit avant moi. C’est plutôt rare, car je suis presque toujours la première arrivée. Sauf ce matin.

J’aimerais quelques fois dessiner une carte géographique de ma vie avec tous les noms des êtres qui me sont chers, imprimés en lettres blanches sur des petites pancartes vertes bordées de blanc, comme les noms des villages de ma GASPÉSIE natale. Chaque personne n’est-elle pas un village en soi? Une histoire à raconter? Des talents à exploiter? Des paysages à admirer? Je planterais aussi des panneaux d’affichage fluorescents annonçant tous les bons conseils que je n’ai pas écoutés; toutes les limites de vitesse qui m’ont jadis rendue folle d’impatience; tous les oui qui auraient dû être des non, et tous les non qui auraient dû être des oui.

Je calligraphierais volontiers à l’encre rose des pensées inspirantes à afficher dans les parcs, dans les cours d’école et les pourtours des universités. Dans les grandes rues commerciales, sur les gros panneaux rouges, j’écrirais ARRÊTE DE CONSOMMER. La consommation inutile n’est-elle pas la plus grosse dépense du logis, surtout ces années-ci?

9 h 15
« Tous ces cœurs, tous ces visages éblouis devant “Madame Butterfly”, de Puccini ». Ainsi parle la copine d’Estrie qui adore l’opéra. Moi qui n’y suis encore jamais allée! C’est un accroc majeur à ma culture et ça devrait être ma première résolution de l’An nouveau. Voilà, je vais y être! Je viens de demander QUAND à l’ami Google. Wow! MADAME BUTTERFLY en personne à Montréal du 6 au 16 mai 2023. J’ai amplement le temps de me renseigner sur cet opéra de Puccini.
— « Google, s’il te plaît, parle-moi un peu de cette Madame Butterfly ».
— « Une jeune geisha de Nagasaki, nommé Cio-Cio-San, devient Madame Butterfly en se mariant à Pinkerton, un officier de la marine américaine. La jeune femme lui voue un amour éternel et attend patiemment son retour avec son jeune fils, jusqu’au jour où Pinkerton revient avec sa nouvelle femme américaine ».
— « OUACHE! Cette histoire est pire que mon mauvais mariage! Mais j’ai envie d’en connaître tous les détails, car j’aime encore les histoires d’amour; même celles qui tournent au vinaigre. À Montréal, du 6 au 16 mai 2023 ».

Hier soir, lovée bien au chaud sur mon divan rouge, j’ai visionné un magnifique film sur NETFLIX : Hector et la recherche du bonheur du réalisateur Peter Chelson, sorti en septembre 2014. Il s’agit des aventures rocambolesques d’un psychiatre nommé Hector (joué par Simon Pegg), fatigué d’entendre les bla-bla de ses clients, et qui décide de partir en voyage autour du monde pour découvrir ce qui rend les gens heureux.

Pendant presque deux heures, j’ai voyagé avec Hector, visité plusieurs pays et recueilli une douzaine de bonnes raisons d’être heureuse. C’est un film absolument magnifique et je vais vite le revoir, car je veux noter chacune des raisons d’être heureux. Je vous recommande chaudement ce film rempli de sagesse.

Nous voulons tous être heureux. N’est-ce pas la principale mission de notre vie? Au-delà des aléas du quotidien, ne devrions-nous pas tous finalement mourir contentés? Pensez-y un brin. Devrions-nous, comme Hector, chercher de nouvelles raisons d’être heureux? Peut-être avons-nous oublié celles que nous pensions avoir?

La vie change la donne tellement souvent et les tracas tombent dans nos chaumières comme des pommes trop mûres dans un verger. Sans devoir, comme Hector, ratisser la planète, j’ai moi-même besoin de désherber mon jardin, d’assouplir mon discours et de m’ouvrir à de nouvelles expériences, rencontres et aventures.

Cora
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